L'Institut pendant la Seconde Guerre Mondiale
La Seconde Guerre Mondiale met en pause les activités bibliographiques de l'Institut : interruption des communications postales, défections de l'imprimeur, etc. Il est toutefois possible d'éclairer les premières années de guerre grâce à la correspondance d'époque qui a été conservée.
Åke Petzäll est retourné en Suède où il a été nommé professeur à l'Université de Lund, et la correspondance avec la France se fait difficile ; Raymond Bayer, mobilisé puis démobilisé, enseigne à Caen puis est de retour à Paris en 1943 ; enfin, Léon Robin travaille à sa traduction de l'intégralité des oeuvres de Platon.
L'Institut employait deux exilés allemands, Traute Kreisler-Lüttschwager (secrétaire) et Herbert Ludwig Kauffmann (bibliographe) : ces deux personnes vont d'abord faire de leur possible pour continuer le travail bibliographique de l'Institut, avant d'être rattrapées par les événements historiques.
Nous avons peu d'informations sur Traute (ou Edeltraut) Kreisler-Lüttschwager, si ce n'est qu'elle travaille pour l'Institut dès sa fondation, en 1937, en tant que secrétaire ; elle donne égalment des cours pour compléter son salaire. Son travail consiste à taper les fiches bibliographiques à la machine et à s'occuper, plus généralement, du courrier de l'Institut. Après la déclaration de guerre, elle est chargée avec Herbert Kauffmann de mettre en sûreté les fiches bibliographiques ; elle aide également Kauffmann à déménager. Dans la correspondance d' Åke Petzäll, on ne trouve aucune lettre de sa main après mars 1940 où elle était encore occupée à la Bibliographie de Philosophie et annonçait au philosophe suédois la publication d'un nouveau fascicule en avril suivant. Une recherche dans la salle des inventaires virtuelle des Archives Nationales nous apprend qu'elle a fait l'objet d'un fichage au Fichier central de la Sûreté nationale, disponible ici (registre), sous le nom d' "Edeltrant Luttschwager". La seule date indiquée, 1940, est certainement celle de la création de la fiche. Néanmoins, une lettre de Raymond Bayer datée du 31 décembre 1941 nous apprend qu'elle travaille à la rédaction du cinquième fascicule de la Bibliographie.
Davantage d'informations ont subsisté au sujet de Herbert Ludwig Kauffmann. Il a soutenu sa thèse de lettres en 1936 à l'université de Paris, intitulée « Essai sur l'anti-progressisme et ses origines dans la philosophie allemande moderne ». On le retrouve, l'année suivante, bibliographe de l'Institut : c'est même lui qui a proposé et porté ce projet, et qui en assure la réalisation. À la déclaration de la guerre, il décide de s'engager dans l'armée française ; mais, du fait de son statut de réfugié allemand, il est envoyé au camp de rassemblement de Maisons Laffitte, puis à celui d'Athis, dans l'Orne, en octobre 1939. Il meurt entre ce moment et la fin 1941, comme nous l'apprend la lettre de Raymond Bayer du 31 décembre 1941. Il a également été inscrit au fichier central de la Sûreté nationale (lien du dossier ; lien du registre) ; on peut supposer que la date de 1940 est l'année de sa mort.
Une nouvelle secrétaire, Suzanne Delorme, est engagée entre 1942 et 1943, en remplacement de Traute Kreisler. Après la Seconde Guerre Mondiale, suite au nouveau sens du mot "collaboration", l'Institut change de nom pour devenir l'Institut International de Philosophie.
Explorer la correspondance numérisée
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Carte de Traute Kreisler à Åke Petzäll du 13 septembre 1939Une carte dactylographiée annonçant la décision de Traute Kreisler de rester en France
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Carte de Traute Kreisler à Åke Petzäll du 12 septembre 1939Une carte postale dactylographiée demandant accusé de réception d'une lettre et donnant quelques nouvelles
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Lettre de Traute Kreisler à Åke Petzäll du 26 novembre 1939Une lettre de deux pages décrivant la situation difficile de Traute Kreisler, sans nouvelles de Raymond Bayer. Y est adjointe une copie d'une lettre de deux pages envoyée par Kreisler à Bayer
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Lettre de Traute Kreisler à Åke Petzäll du 16 octobre 1939Une lettre de deux pages sur la situation de Traute Kreisler et Herbert L. Kauffmann au début de la seconde guerre mondiale : Kauffmann est interné et Kreisler n'a pas reçu son salaire